Je suis partie me promener, 1h32 je marche dans les rues de Québec. J'arrête à une pharmacie, elle me regarde, non pas du même regard que bien d'autres me regarde, mais elle ne me dévisage pas. Elle me regarde, d'un air déçu, triste. J'ignore ce qui lui prend moi, à cette femme, cette vieille femme qui me dénude du regard, comme si j'en avais pas assez avec les vieux qui me harcèlent quand je leurs sers leurs repas de merde à mon restaurant. Je m'achète du papier de toilette, putain que c'est cher pour du papier qui va me torcher le cul. Je fouille vite fait dans la section cosmétique, et je la revois. En train de fouiner dans les crèmes rajeunissantes. Elle ne m'a pas vue, trop concentrée à lire les bêtises des vestons cravates faisant croire aux gens qu'il vont redevenir jeunes et beaux.
Elle échappe la crème et se lève subitement,
-euh, pardon madame... je ne voulais pas..
Je suis idiote, moi petite que je suis je l'ai accrochée en passant avec mon papier de toilette. Ça ne lui a pas fait mal, ni tomber, mais elle s'est faite surprendre à regarder ces cochonneries de crème fausse. Elle est gênée, je la vois me regardant du coin de l'œil. Pourquoi est-ce qu'elle est gênée de moi ? Parce que j'ai la jeunesse qui lui manque. Je la comprends, pauvre femme, je ne suis pas parfaite, mais ma peau est jeune. Et cette dame la, ça ne lui plait pas, du moins elle aimerait surement mieux être à ma place. Moi je l'envie, elle est vieille mais elle a du vécu, elle a fait sa vie, elle a baisé même surement plus de fois que moi encore et s'est payé surement du très bon temps. J'aimerais bien moi, avoir terminé de vivre cette galère, me caser tranquille dans une maison avec un homme qui m'aime depuis longtemps. Moi je n'ai connu que les nuits froides de baise sauvage, quelques douceurs rares, les bars et l'alcool. C'est moi qui lui en veux soudainement, d'être à l'aise dans cette société. Moi je n'y vois pas ma place, exceptés les bars de débauche ou les hommes macho qui m'en trouvent une assez vite fait bien fait quelque part.
Bon, c'est moi qui me sens pas trop bien. Je vais payer mes trucs trop chers pour rien et repars dans mon appartement, seule, au demi sous sol. Je me couche et je fixe le plafond. Mon dieu, je n'avais jamais pensé a quel point avoir la jeunesse qui leur manque doit leur manquer quelquefois. Je me regarde soudainement et je me sens belle. Moi qui ne m'aime pas (mais qui devrais) je me trouve jolie. Je me déshabille, même en enlevant mon string je pense à elle qui n'en porte surement plus. Bon après quoi, on doit être confortable aussi dans leurs grande bobette. Je me trouve ridicule de penser a ça et je pars à la douche, tout juste avant je m'intercepte moi même devant le miroir. Je me regarde, pratiquement comme une analyse corporelle d'entraineur un peu trop parfait. Je touche mes seins, il sont beaux, ronds et fermes.. enfin j'ai quand même 23 ans, ils sont encore très jolis. Pas comme la première poussée de tétons à 14 ans mais bon. Bref je pense à elle encore, elle m'obsède putain cette vieille dame, je me sens bien dans ma peau aujourd'hui, mais elle ? Pauvre elle..
Je rentre dans la douche, je me lave et j'en ressors. Enfin je crois que je l'ai oubliée. Je finis par diner, souper, dormir.
Deux semaines plus tard elle est morte. Je le sais parce qu'au travail j'ai vu sa photo dans le journal, Rosaline. Je me sens tellement mal, sans aucune raison. Je regarde ou se passe l'enterrement. Deux jours plus tard, je suis au travers deux trois personnes qui pleurent et de la famille. Évidemment je n'ai rien a voir là. On pouvait laisser des fleurs ou des choses pour elle. Moi, j'ai laissé a Rosaline une lettre. Une toute petite lettre que j'ai écrit bien vite. Tout ce que je voulais qu'elle sache, cette Rosaline maintenant morte.
''Sache que j'ai la jeunesse qu'il te manquait, mais toi t'as eu l'expérience de savoir grandir que moi je n'ai pas encore atteinte. Je cherche, je cherche mais en vain...''
Merci à imnotalright, ''Parce que j'ai la jeunesse qui lui manque. '' donc j'ai accroché dans l'un de ces textes.
Écrit avec un peu de vulgarité, mais comme j'ai aimé! Ton texte m'a fait sourire, en cette soirée tardive et je ne me suis pas ennuyée du tout dans ma lecture! Merci pour ce beau texte, le sourire aux lèvres
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