5. Immortelle

La réplique passa la tête dans l’embrasure de la porte.

« Ça a marché ?

— Comme sur des roulettes, soupirai-je. Une jeune fille romantique, ainsi que nous l’avions deviné. Même sous la torture elle ne révélera rien... d’autant qu’elle ne tardera sans doute guère à profiter des facilités que je lui ai fait miroiter.

— Romantisme mâtiné de pragmatisme, hein ? Un amalgame assez courant de nos jours. Made in Hypercap.

— Néanmoins je veillerai à ce que nous rédigions à l’avenir des bulletins de santé plus inventifs. »

Hochant la tête, elle vint à moi et me sourit. C’était un sourire sans moquerie. Il y avait en elle un peu des atomes d’Olga, mais aussi beaucoup de moi : ces torrents d’affectivité dont je les avais toutes abreuvées, année après année, de par ma simple présence auprès d’elles, de par mon opiniâtre besogne quotidienne pour coordonner le travail d’un bataillon de clones, au service d’une idée, d’un souvenir, d’un visage d’elfe au rire stoppé net.

À ma mort, les répliques se relaieraient pour poursuivre la tâche. Double privé d’original, Olga se créerait et recréerait, s’enroulant en quelque sorte indéfiniment sur elle-même à l’instar des spirales d’azur ornant son crâne ravissant. Éternellement jeune et forte. Immortelle. Quant à notre secret, je l’emporterais dans la tombe, ma matrice à moi.

Olga m’enlaça et nous nous embrassâmes amoureusement.

« Venez, Müller. Ne pensez plus à toutes ces bêtises. »