Je me trouvais en présence de la plus grande affaire que je n'avais jamais connue. Antoine bougea son cheval tandis que je bougeais mon roi. Je venais de subir une embuscade qui selon moi menait tout droit à l’échec : - Échec et mat ! hurla Antoine avec les cheveux en pétard. - Ce n'est que de la chance, lui dis-je de mauvaise foi, attendez donc la prochaine bataille et je vous garantis une humiliation. - Je veux mes cinq-cents francs ! jubila-t-il, et ne soyez pas long. - Vous les aurez à notre retour à Paris. - Combien coûte votre montre ? dit-il me laissant égaré. - Elle vaut cinq-cents francs. Mais, que voulez-vous savoir au juste ? Non... Antoine... ne me dites-pas que vous voulez désormais ma montre ? - Pourquoi pas ? - Vous avez vraiment tout d'un businessman, vous allez tous nous ruiner si on vous embauche avec ces yeux-là. - Pauvre flatteur que vous êtes, répliqua-t-il avec le sourire, je vous laisse pour cette fois-ci, mais arrivé à Paris... - Oui, c'est promis, je vous donnerai votre liasse.
Nous étions en train de parler lorsqu'un son dans la nuit retentit : - Qu'est-ce donc ? ! Fis-je. Antoine ? Vous avez vous aussi entendu ? - Oui... ça venait de là-bas, il désigna le couloir, nous devons y aller. - Mais comment pouvons-nous savoir qu'il n'y a pas de danger ? - Nous sommes venus ici pour enquêter, n'est-ce pas ? - Hélas, oui. - Donc enquêtons. - Oui, seulement... - Seulement quoi ? demanda-t-il étonné. - C'est que, j'ai toujours eu peur des loups. - Je le sais bien, mais, selon les témoignages, il ne s’agit que d'un loup ; grâce à mon fusil nous sommes hors de danger. Il le sortit de son manteau : - Où avez-vous trouvé ça ! lui dis-je. - Je l'ai rapporté, c'est le... - Oui, c'est bien le mien... Quel culot, Antoine, vous voulez mon argent alors que vous avez déjà mon fusil. Quand il finit sa phrase, un grognement retentit dans l'autre pièce. Puis une silhouette. Des yeux rouges et brillants. Cela s'avance vers nous. Antoine prend un coup de patte. Il s'envole. La bestiole m'agrippe et me jette comme un cyclope jetant une pierre. Nous nous retrouvons Antoine et moi aplatis au même endroit, avec un horrible mal de crâne : - Par tous les diables ! hurlais-je, et vous parlez d'un loup ? - Comment pouvais-je savoir, dit Antoine, vous savez bien qu'il faut s'attendre à tout lors de nos expéditions ! - Pas à me faire dévorer, non ! La bête nous jeta une table, que nous esquiverons de justesse : - Et maintenant ! - Essayons de récupérer le fusil ! - Antoine ! - Oui ! ? - Je vous hais ! - Moi, je vous aime ! Au même moment, la bestiole nous balança le portrait ridicule qui se trouvait accroché au milieu du salon : - Attirez-le donc vers le balcon ; je m'occupe de récupérer le fusil, dit Antoine. - Très bien ! Je partis en direction du balcon en levant les bras pour attirer la bête. En un instant, avec la rapidité d'un fauve, sa tête se tourna vers moi, puis elle se mit à me suivre. Je ne m'en étais pas rendu compte, mais je le voyais désormais, elle faisait plus de deux mètres de hauteur et elle portait un pantalon de Gentleman ; ce qui, à mes yeux, était un signe d'une anormalité certaine. Si cela était ce que je pensais ; nous avions là affaire non pas à un monstre, comme on le croyait, mais bien à ce fameux scientifique fou nommé Maxence Débile. Il me semble qu'on l'a surnommé Débile le jour où il échoua à ses examens de médecine. Les gens ne l'aimaient pas beaucoup, parce qu’il était distant et vexant ; cependant, il ne méritait pas ça ; pas un sort pareil, quelle fin horrible - finir comme un monstre !
Antoine le toucha en pleine tête. Nous ne saurons donc jamais ce qu'il s'est réellement passé dans la tête de Maxence Débile, et où, par tous les Diables, il puisa ses connaissances.
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